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1 média disponible 1 média disponible A participé à la Grande GuerreL'actualité de la guerre au jour le jourUnité(s) : 6e régiment d'infanterie (6e RI) Domicile lors de la mobilisation : Migné-Auxances (86) |
Parents
- Delphin Alphonse Physique Savin 1862-1947
- Ernestine Besson 1866-1960
Union(s) et enfant(s)
- Marié le 22 avril 1913, Migné-Auxances, avec Berthe Rat 1891-1976 dont
Robert Victor Alphonse Savin 1914-2001
Fratrie
René Edmond Savin 1889-1989
Alphonsine Savin 1891-1938
Hélène Savin 1894-1959
Lucien Ernest Alphonse Savin 1896-1979
Céline Savin 1899-1999
Albert Maurice paul Savin 1900-1986
Juliette Savin 1903
Maurice Paul André Savin 1906-2001
Madeleine Savin 1911-1994
Notes
Notes individuelles
1 - Service militaire :
Extrait des registres matriculeImmatriculation : 1348 canton Poitiers nord
Signalement :Cheveux châtains yeux gris taille : 1,71m
Profession : carrier
Armée active :5 octobre 1910 5ème régiment du génie soldat 2ème classe, caporal le 27 septembre 1911.
En disponibilité le 27 septembre 1912.
Mobilisé le 3 août 1914 au 6ème régiment de génie.parti aux armées le 5 août 1914
10 avril 1917 évacué du front pour maladie
8 août 1918 déclaré apte à faire campagne par décision de la commission de réforme d'Angers.
Armée territoriale :
Passé dans la territoriale le 29 juin 1918 comme père de 4 enfants.
2 fèvrier 1919 envoyé en congé illimité de démobilisation à Migné par le 6ème génie 2ème échelon
19 janvier 1921, classé dans l'affectation spéciale de la compagnie des chemins de fer d'Orléans comme d'équipe à Migné.
Campagnes :
3 août 1914 au 12 fevrier 1919
A l'intérieur 2 au 4 Août 1914
Au front du 5 août au 11 octobre 1915du 5 janvier au 2 février 1915 évacué pour maladie sur le st sacrement à Arras.Rentré à la compagnie aux armées le 2 février 1915
Intérieur du 12 octobre au 26 novembre 1915 évacué pour maladie.
Au front du 25 février au 9 avril 1916 en renfort
intérieur du 10 avril au 30 décembre 1917 évacué pour maladie, rentré au dépot le 2 septembre 1917
Au front du 31 décembre 1917 au 13 janvier 1918 En renfort
Intérieur du 14 janvier 1918 au 11 février 1919évacué pour maladie le 14 janvier et rentré au dépot le 30 avril 1918
2 - Service militaire et début de campagne de la première guerre mondiale 1914 et 1915 au sein du 6ème régiment du génie.
Campagne de 1914-1915Notes journalières de René SavinCaporal au 6ème génie (1).
3 Août 1914
Départ de Sigon à 5h30. De Migné les Lourdines à 6h matin. Arrivé à Angers St Laud à 15h. Après révision de l'ordre d'appel, nous sommes envoyés à l'université catholique pour nous faire habiller.
4 au 6 août
Séjour à Angers - habillés et équipés.
7 août
Départ d'Angers à 16 heures, gare de Maître Ecole. Enthousiasme indescriptible. Wagons ornés de fleurs et de drapeaux. Cris et chants tout le long du trajet.
8 août
Passage à Laon.- Très chaleureux accueil par les civils à la gare, qui nous donnent du tabac et cigarettes.
9 août
Arrivons à Attigny (Ardennes) et débarquons 18 heures soir. Allons ensuite coucher à Le Chesne où nous arrivons à 24h.
10 août
Départ du Chesne à 5 heures matin et arrivons à Floing, près Sedan, à 15 heures, après avoir fait la grand' halte dans cette dernière localité. Dès notre arrivée à Floing, sommes reçus à bras ouverts par les habitants qui nous offrent tout ce dont nous avons besoin.- bière, aliments, tout nous est prodigué, on nous lave notre linge, enfin les braves gens ne savent quoi faire pour nous être agréable.
11 au 14 août
Séjour à Floigny- Nous entendons le canon gronder. Visitons le monument de 1870 (2) et le musée.
15 août
Départ De Floing à 18 heures. Marchons toute l'après-midi sous une pluie diluvienne, qui ne cesse qu'en arrivant à Boulzicourt, à minuit où nous couchons.
16 août
Départ 5 heures matin- toujours trempés de la veille. Arrivons à Bourg fidèle à 13 heures. Je n'en peux plus et ai les pieds en sang- nettoyage et repos.
17 août
Départ à 5 heures matin, arrivée à Gonrieux (Belgique) 12 heures très fatigués, mais allons tout de même au village, où la bière abonde et où l'on trouve du tabac très bon marché- excellent pays.
18 août
Repos à Gonrieux, revus d'effets
19 août
Départ à 0h30 matin, arrivons à Hansinelle à 16 heures – Toujours très bon accueil des habitants.
20 août
Départ à 5 heures matin, arrivons à Biesmes à 21 heures 1/2.
21 août
Départ à 18 heures.- Sommes à proximité de l'ennemi.
22 août
Bataille dans les bois en avant de Falaisol.Nous faisons des tranchées toute la journée.- Harcelés par l'ennemi, nous reculons et revenons coucher à Biesmes
23 août
Départ à l'aube.- Nous reculons jusqu'à Oret, où nous faisons des tranchées.- Alternative d'avance et de recul toute la journée.- Sommes exténués.- Le soir débandade générale occasionnée par le 241ème qui tire sur nous. Après le rassemblement tant bien que mal dans la nuit, l'ennemi s'est arrêté lui aussi et nous couchons sur le champ de bataille.
24 août
Partons à 4 heures matin- Marchons toute la journée. Passons à Cerfontaine à 18 heures, où nous vivions cantonnés. Mais l'ennemi s'approchant, nous continuons notre route, et arrivons exténués, fourbus à 1 Kilomètre de Chimay, à minuit, où nous couchons dans un champ d'avoine mouillée, non coupée.
25 août
Sommes réveillés à 3 heures matin, pour poursuivre notre route jusqu'au village de Chimay, où nous nous couchons sur le trottoir ; après avoir dormi, circulons dans la ville et trouvons un peu de charcuterie et du vin à 1f25 le litre.- Nous partons de Chimay à 20 heures et allons coucher à Virelles, non sans avoir fait, auparavant, des tranchées hors du village.Sommes enfin couchés à 23 heures.
26 août
Départ à 5 heures matin.- Arrivons à Hirson à 12 heures.- Nous voici de nouveau en France.- Restons à Hirson faire sauter les ponts de chemin de fer et reprenons notre route à 20 heures du soir, arrivons à 1 heure matin au Hélin.
27 août
Faisons des tranchées
28 août
Et reprenons la route à 1 heure le lendemain matin et nous arrivons à 22 heures à la Vallée-au-blé, nous faisons des tranchées une partie de la nuit et couchons sur le terrain.
29 août
Départ à 3 heures matin - Rencontrons l'ennemi au delà de sains - Richaumont - Alternative d'avance et de recul toute la journée - bataille acharnée pour le village.- A la nuit, nous le tenons et couchons sur place pendant quelques heures.-
30 août
Mais à l'aube, la nouvelle offensive vigoureuse de l'ennemi, qui nous oblige à reculer. Nous nous battons toute la journée et couchons à Erlon.
31 août et 1er septembre
Restons à Erlon, où nous faisons des tranchées.- Partons à midi, passons à Cuirieux et couchons à Cormigny à 21 heures.
2 septembre
Départ à 5 heures matin, arrivons à Rosnay à 17 heures et couchons.
3 septembre
Départ à 3 heures (réveillés par l'ennemi, à temps heureusement) - Reculons et arrivons à 12h à Epernay. Nous embarquons en chemin de fer.
4 septembre
Arrivée à Vimpelle, où nous faisons des tranchées et à Nogent sur Seine. Nous cantonnons à Soligny.
5 septembre
Départ en autos à 20 heures soir,- Arrivons à 7h matin à Sézanne.-
6 septembre
Couchons dans une ferme aux alentours et marchons depuis 6 heures matin jusqu'à Charleville.
7 septembre
Bataille- faisons des tranchées - couchons dans un petit bois et sommes délogés à l'aube par les mitrailleuses ennemies.- revenons ensuite.
8 septembre
Coucher sur la place de Charleville, parmi les barricades.
9 septembre
La bataille fait rage.- Nombreux prisonniers - nombreux morts.
10 septembre
Départ à l'aube de Charleville.- Couchons à Bergères les Vertus.
11 septembre
Départ de Bergères les Vertus.- Nous poursuivons l'ennemi et arrivons pour coucher à Ludes le Coquet. Sommes tous trempés de pluie. Je n'ai plus de sac et une Dame charitable m'offre l'hospitalité dans son grenier, ainsi que des vêtements. J'ai avec moi un camarade de l'escouade. Nous couchons.
12 septembre
Départ à 4 heures du matin pour Puisieux (toujours dans le département de la Marne)
13 septembre
Nous restons dans cette localité et dans les environs du 12 au 18.
14 et 15 septembre
Nous faisons des tranchées, soit le jour, soit la nuit.
16 septembre
Nous logeons sous le hangar d'une grande ferme. Ce hangar est plein de blé non battu.
17 et 18 septembre
Les obus tombent autour de nous comme grêle. Nous avons de nombreux blessés. Le fermier est arrêté comme espion. (Il avait le téléphone relié aux boches dans la cave) (3)Dans l'intervalle l'ennemi, ayant appris par ce fermier que la ferme servait d'abri à l'état major de la Division, avait envoyé sur cette dernière une grêle d'obus qui l'avait incendiée. Tout cela n'aboutit qu'à tuer de malheureux blessés qui étaient soignés dans les bâtiments attenants à cette ferme et beaucoup d'autres hommes occupés soit à soigner les chevaux, soit à faire la cuisine aux abords de la ferme. Nous partons le 18 à 8h1/2 du matin et revenons coucher à Rosnay.
19 septembre
Départ à 3 heures du matin, arrivons à Merfy, près de Reims - nous l'avons d’ailleurs contourné depuis Puisieux.- Arrivés à Merfy, nous faisons des tranchées parmi les vignes et revenons le soir au village où nous couchons dans un château(4). Je suis de garde le soir et n'ai pas beaucoup de temps pour dormir.- Très bien couchés pourtant.
20 septembre
Retournons faire des tranchées.- Voyons d'une éminence brûler Reims et la cathédrale que l'ennemi bombarde toujours.- Couchons au château.
21 septembre
Départ à 17 heures du soir.- Couchons à Châlon sur Vesles
22 au 24 septembre
Châlon sur Vesles - Restons derrière nos faisceaux toute une journée.- Nous sommes en réserve d'armée et attendons les ordres pendant 4 jours. Couchons dans une ferme et revenons derrière dans le jour former les faisceaux.
25 septembre
Enfin le départ à 8 heures du matin, arrivons à Mesles à 16 heures. Sommes sortis de la zone dangereuse.
26 septembre
Départ à 5 heures du matin arrivons à la Ferté Millon à 18 heures.- Couchons
27 septembre
Repartons à 4 heures du matin. Arrivons à Rulli à 15 heures. Couchons dans une grande ferme, dans l'étable.
28 septembre
Partons à 4 heures matin.- Arrivons à midi à Verberie. Couchons dans l'asile des vieillards (5), bien logés, lits.
29 septembre
Départ de Verberie à midi. Arrivons à Longueuil Ste Marie (gare) à 14 heures.- Embarquons le soir à 18 heures à cette gare.- Débarquons à Villers Bretonneux (Somme) à 23h30.Débarquons tout notre matériel, voiture, etc.
30 septembre
Partons à 1 heure du matin.- Arrivons à 6 heures matin à Luerrieux (Somme). Couchons.
1er octobre
Partons à 6heures matin.- Arrivons à Beauvillers sous bois à 19 heures du soir. Couchons.
2 octobre
Départ à 3 heures matin, arrivons à Mercatel (Pas de Calais 6kms d'Arras) à 8 heures du matin. Nous restons toute la journée dans une plaine, derrière l'artillerie parmi une nombreuse troupe.- Couchons à Mercatel.
3 octobre
Revenons le matin à la même place que la veille. Couchons de nouveau à Mercatel.
4 octobre
À 1 heure du matin, départ pour faire des tranchées sur la ligne de feu. Après 3 heures de travail acharné, sommes surpris par l'ennemi et obligés de nous replier sur Mercatel. La fusillade fait rage sur nous et aussi sur Neuville Vitasse qui se trouve à notre gauche et que nos fantassins attaquent. Nous suivons le fossé de la route qui est profond et nous protège des balles, surtout des explosives qui arrivent dans les arbres comme une pluie de feu.- Arrivons de cette façon à l'entrée de Mercatel. Là nous trouvons le colonel du 136 ème infanterie (6) qui nous arrête (nous ne sommes plus qu'à peine qu'une section avec un lieutenant).- Le colonel nous donne l'ordre de refaire la barricade, ce que nous faisons vivement sous une pluie de mitraille.- Il nous faut ensuite la garder. Enfin un ordre arrive et nous repartons, nous retraversons Mercatel plein de troupes qui battent en retraite et nous retrouvons notre capitaine et le reste de la compagnie.- Repartons faire des tranchées dans la plaine.- Sommes repérés par l'artillerie ennemie qui nous bombarde et blesse beaucoup des nôtres. D'un seul obus, j'ai 2 hommes de chaque côté de moi blessés, mon sous officier, mon maître ouvrier et notre lieutenant.- Partons tous en débandade aux postes de secours les plus proches, les uns aidant les blessés, les autres portant armes et équipements. Couchons ensuite à Mercatel.
5 octobre
Départ à l'aube. Faisons toujours tranchées sur tranchées. Reculons jusqu'à Agny et dans ce village sous la mitraille incessante faisons des créneaux et des barricades.- Allons ensuite à 8 heures du soir, sans avoir eu le temps de faire la soupe, faire des tranchées en haut d'Agny jusqu'à minuit. Revenons ensuite à Achicourt où nous touchons ce qu'il nous faut et faisons la cuisine. Nous mangeons à 3 heures du matin et nous nous couchons.
6 octobre
A 5 heures du matin,- nous sommes à peine couchés. départ.- nous avions de la paille, mais nous avions eu froid malgré cela.- Nous passons à Dainville, toujours sous le feu de l'ennemi et allons coucher dehors, auprès du remblai et du pont de chemin de fer.- La paille ne manque pas.
7 octobre
Nous nous réveillons complètement gelés et nous partons à 8 heures matin. Faisons 2 kilomètres, arrivons à Wagnonlieu toujours en faisant des tranchées.-
Nous couchons à Wagnonlieu à 2 heures du matin.- Nous travaillons de nuit et repos le jour.- Travaillons tout près d'Arras.
8 octobre
Réveil à 6 heures. Départ aussitôt pour le travail (tranchées).-Retour à 18 heures journée finie.
9 octobre
Réveil à 6h.- Garde de l'état major.- Partons à Daimville (1Kilom500) à 16h. Restons à geler de froid sur le trottoir jusqu'à 20 heures 1/2 et revenons coucher à Wagnonlieu dans nos cantonnements.
Du 10 au 13 octobre
Alternatives de gardes et de travaux de tranchées en arrière d'Arras.- Le plus souvent travail le jour et garde du général la nuit. Sommes en sécurité des obus, c'est le principal.
14 octobre
Réveil à 4h, départ à 6h allons à Arras.- Arrivons par Daimville, sous la pluie, à 9 heures du matin. Sommes logés dans les casernes du 33è d'infanterie nommée Schramm (7).
15 octobre
Réveil à 4h1/4.- Départ à 5h1/4. Tranchées et déboisement le long de la ligne de chemin de fer depuis la gare d'Arras jusqu'à Blangy.
16 octobre
Même travaux. Nous organisons les maisons en défenses, faisons créneaux, tranchées etc...
17 octobre
Même travaux.- Travaillons 24 heures
18 octobre
Arrivons à huit heures du matin.- Repos ensuite.-
19 octobre
Réveil à 5h1/4 matin, départ à 6k1/4.- Allons à Ronville (faubourg d'Arras).- tranchées et barricades avec réseaux de fil de fer à proximité de l'ennemi jusqu'à 20 heures du soir.- En faisant ces travaux, découvrons une cave dans une distillerie bombardée et détruite où il reste 3 demi muids d'eau de vie de 600 litres chacun. Nous buvons une goutte et remplissons nos bidons.- A 20 heures nous allons dans une grange à 400 mètres en arrière où l'on nous a apporté la soupe que nous mangeons froide. Puis à 21 heures, nous repartons.- Il fait très noir.- Nous sommes à la disposition d'un capitaine d'infanterie qui a dû faire honneur à la bouteille, car il nous emmène auprès du talus se trouvant à 100 mètres en arrière d'une briqueterie qu'il s'agit de prendre.- Nous nous couchons à plat ventre, dans l'herbe mouillée, le long du talus, car les balles et les obus sifflent de plus belle. De plus, la pluie se met à tomber avec force et le capitaine nous fait rester jusqu'au jour à la même place, tremblants de froid et mouillés.- Après avoir essayé de prendre la briqueterie, nous y renonçons l'ennemi étant trop en nombre et bien retranché.- Nous retournons à notre grange de la veille.-
20 octobre
4h30 du matin, l'on nous fait rester jusqu'à 13 heures de l'après-midi pour attendre la section qui doit nous remplacer. Elle arrive enfin et nous restons au quartier, grelottants et fourbus.
21 octobre-
Le réveil à 5h1/4 et départ à 6h1/4.- Nous allons de nouveau à Monville faire tranchées et barricades.
22 octobre
Nous rentrons à 8h matin.- Repos jusqu’au lendemain.Du 23 au 31 octobreToujours à Arras, soit dans les faubourgs soit dans la ville, à faire les mêmes travaux de défense que précédemment.- Bombardement journalier et ininterrompu de l’ennemi.- Nombreux civils et soldats tués ou blessés.- Arras est en ruine.- Le beffroi est bombardé et mis à bas par les obus devant nos yeux.- Les rues où nous passons pour nous rendre au travail sont jonchés de débris de toute sorte. L’aspect de la ville est lamentable. Beaucoup de civils fuient.- D’autres, plus courageux, restent quand même.
Du 1er au 7 novembre
Nous restons toujours à Arras.- Nous avons changé de caserne, le quartier Schrams étant trop bombardé.- Nous logeons maintenant à la citadelle (anciennement construite par Vauban). Nous logeons au 1er étage, mais nous y fions pas de trop, car les obus tombent tout autour.- Nous allons toujours travailler dans les environs d’Arras et dans la ville. Nous organisons le château de Sainte Catherine-les–Arras.- En faisant des tranchées une journée dans le parc de ce château, nous comptons 29 obus ennemis qui tombent à 100 mètres dans la prairie en avant de nous sans éclater.- Restons souvent à travailler jusqu’à minuit et davantage, mais en revanche nous trouvons quelques fois de bonnes caves où le vin est fameux.- Faisons sauter les ponts de Sainte Catherine et de Saint Nicolas.- Travaux très pénibles.
Du 8 au 20 novembre
Après avoir miné ce qui reste des écluses de Sainte Catherine et Saint Nicolas, nous alternons chacun à notre tour, pour prendre la garde de ces ponts minés et pour les autres travaux de défense.- Pendant cette période du 8 au 20, nous avons 2 morts et 3 blessés à la compagnie. Depuis le début, nous l’échappons belle à chaque fois, et la compagnie n’est pas trop éprouvée.- Dans mon escouade (14ème, 4ème section) je n’ai eu jusqu’à l’heure actuelle que des blessés.-
Du 21 au 31 novembre
A partir de cette date, nous travaillons à Saint Laurent Blangy, faubourg d’Arras.- Nous faisons des mines et travaux d’approche souvent dans des maisons séparées de l’ennemi que de 30, 20, 10 et même 5 mètres !- Il tombe de la neige et le froid est très vif.- Très mauvais secteur, où la mitraille fait rage sans cesse.- Nous sommes souvent trois jours et trois nuits à Blangy, travaillant par équipes, et nous retournons ensuite à la citadelle, considérée comme repos, nous allons travailler 8 heures dans la journée aux travaux de défense en 4ème 5ème ligne, à Archicourt sur la ligne de chemin de fer.
Du 1er au 11 décembre
Il fait moins froid, mais la situation ne change pas. Nous alternons toujours le travail de Blangy et d’Archicourt.- Dans cette localité nous formons une formidable ligne de défense, tranchées réseaux de fil de fer, etc., sur plusieurs kilomètres depuis la gare d’Arras._ Nous sommes souvent arrosés par la mitraille, sans grands dommages.- J’ai toute une compagnie de territoriaux sous mes ordres, pour faire les tranchées.-
Du 12 au 15 décembre
Le temps est très pluvieux et il n’y fait pas bon.- Heureusement qu’en rentrant au quartier, nous trouvons pour nous coucher de bons matelas, et nous faisons ronfler les poêles dans les chambrées, sans souci des obus qui pleuvent autour de nos bâtiments. Le soir du 15, nous recevons une soixantaine d’hommes de renfort, revenant du dépôt, ce qui n’est pas de trop, la compagnie ayant été diminuée par les nombreux blessés que l’on a eu depuis notre arrivée à Arras.- Je suis depuis quelques temps à la 16ème escouade.- Il est affecté un maître Ouvrier à mon escouade, pris sur le renfort qui vient d’arriver.
16 décembre
Nous avons repos, ce qui n’est pas bon signe !
17 décembre
C’était à prévoir !- Dès l’aube, réveil et rassemblement en tenue de campagne. Des équipes avec leur chefs sont désignées avant le départ, celle-là pour couper les réseaux de fil de fer, munis de pinces, celles-ci pour porter les tringles de pétards, etc.… car c’est à une attaque que nous allons.- Nous arrivons à Blangy à 7 heures matin.- Attente et préparatifs jusqu’à 10 heures ¼ ; après le signal de l’attaque, chaque équipe, encadrée de fantassins se précipite à son poste.- je suis de la 3ème équipe c'est-à-dire celle qui doit, après les fils de fer ennemis coupés, sauter dans la tranchée boche et échanger le parapet de côté, de façon à pouvoir utiliser cette tranchée pour nous le plus vite possible.- Nous avons outre nos équipements et notre fusil, un pétard chacun, avec son allume feu, le tout passé dans le ceinturon 3 chausse-trappes, (sorte d’étoile à trois branches, tout en fer et pointue aux extrémités) de plus chacun de nous est muni d’un sac à terre, (sac plein de terre, ayant comme dimensions environ 65 centimètres de hauteur sur 20 centimètres de diamètre).- Quelques minutes après le signal de l’attaque, l’homme de liaison nous dit que les fils de fer sont coupés et nos hommes (1ère équipe et 2ème) dans la tranchée ennemie. Nous courons donc autant que les blessés et les morts nous le permettent parmi l’unique boyau desservant nos lignes sur les traces de nos camarades. Mais à 30 mètres de la tranchée ennemie, nous sommes arrêtés net par le feu de plusieurs mitrailleuses ennemies, cachées soit dans une tourelle, sur notre gauche, soit dans le château, en face de nous, à 20 mètres derrière la tranchée, qui correspond d’ailleurs au château. Beaucoup de nous tombent pour ne plus se relever, nous nous couchons à plat ventre et regagnons en rampant l’extrémité de notre boyau de communication, où nous pouvons souffler un peu, quoique le vacarme de la canonnade et de la fusillade tombe comme grêle autour de nous, nous sommes aux créneaux de notre 1ère ligne et faute de fantassins presque tous tombés, nous repoussons une contre attaque ennemie.- A 14 heures le vacarme cesse un peu, puis tout rentre le calme ou presque. L’attaque est complètement échouée.- A la nuit, des fantassins viennent nous relever et nous rentrons, noirs, exténués, dans les caves du château rouge, à 50 mètres en arrière d’où nous sommes. Nous n’avons rien mangé depuis la veille, seulement pris le café le matin.- Nous faisons l’appel, beaucoup de nos malheureux camarades manquent. Dans mon escouade, j’ai 3 morts, 2 disparus et 3 blessés, dont un gravement justement le Maître Ouvrier affecté à mon escouade la veille.- Nous ne restons donc plus qu’à 5 moi compris, sur 13 que nous étions partis le matin !- Après ces tristes constations nous cassons une croûte et nous nous endormons d’un sommeil de plomb, sur un peu de vieille paille, dans le fond de notre cave.
Du 18 au 20 décembre
Nous restons le lendemain et les jours suivants à Blangy pour la réfection des tranchées et l’enterrement des morts qui sont tombés dans nos lignes et que l’ont peut avoir. Retour au quartier le soir du 20.
21 décembre
Repos.- Nous nettoyons vêtements et armes.
22 décembreRepos.- Jusqu’au soir à 22 heures départ pour Blangy.
Du 23 au 25 décembre
Pendant ces trois jours et trois nuits, nous travaillons alternativement 6 heures par 18h dans une galerie de mine partant de la fonderie de Saint Laurent-Blangy et ayant la poste occupée par les allemands comme objectif. Nous avons de l’eau jusqu’à mi-jambe.- Lorsque nous retournons au quartier, le soir du 25, nous sommes exténués et fourbus.- Pour ma part, je sens que ça ne va pas.
26 et 27 décembre
Je me sens de plus en plus malade et je ne mange presque plus. Je me décide à aller à la visite.
Du 28 décembre 1914 au 5 janvier 1915
Pendant tout ce laps de temps, je vais à la visite tous les matins et le major reconnaissant que j’ai un embarras gastrique me met exempt de service.- Mais je ne peux rester sur mon lit car nos caserne sont bombardées pendant le jour et les hommes restant au quartier (employés ou malades) sont obligés de se réfugier dans des souterrains.- Ces souterrains étant très frais, ma maladie s’aggrave et le major se décide à m’évacuer sur l’arrière…
6 janvier
Je couche à Abarq ayant été amené en auto depuis l’hôpital du Saint sacrement d’Arras qui se trouve à deux pas du quartier.
7 janvier.
Départ en fourgon à 7 heures du matin pour Liencourt, arrivons à midi dans cette localité. Nous sommes déposés à l’ambulance et là on nous donne u peu de bouillon. Je suis logé à la maison d’école du pays.
Du 8 au janvier au 3 février.
Je reste à Liencourt en traitement. Nous sommes une douzaine dans la salle, la nourriture et les soins laissent un peu à désirer, mais nous ne sommes pas sous les marmites et les balles. Nous avons droit de sortie 2 heures après chaque repas, mais on trouve peu de chose dans le pays, car nous sommes dans la zone des armées (25kilom d’Arras environ).- La commune est d’ailleurs très petite. Beaucoup de réfugiés du Nord ont logés dans le pays. En somme l’on s’embête d’un bout de la journée à l’autre.
3 février
Le Major me trouve guéri. Je pars donc pour rejoindre ma compagnie à Arras où j’arrive à 21 heures du soir. Beaucoup de changements à la compagnie depuis mon départ, plusieurs camarades ont été tués ou blessés ou prisonniers à l’attaque ennemie du 16 janvier. Je suis versé à la 25ème escouade.Du 4 au 7 févrierJ’ai 4 jours de repos au quartier que le Major de Liencourt m’a accordé avant mon départ.
8 février
Je suis de garde au quartier.
Du 9 au 19 février
Je pars à Monville à 18h pour travailler à une galerie de mies commencée depuis plus d’un mois, faisant déjà 380 mètres de profondeur (près de 300 mètres sous les lignes ennemies) et ayant pour but de faire sauter : 1° une briqueterie occupée par l’ennemi et organisée en fortin. 2° une batterie de 77 repérée par nos avions. 3° plusieurs fractions de tranchée gênant nos travaux d’approche. Plusieurs mineurs civils travaillent avec nous au fond. Des territoriaux, espacés d’environ 30 mètres roulent la brouette. Le travail est très pénible en plein roc et la galerie ne faisant que 1m30 de hauteur le rendent très difficile.- Nous faisons 5 chambres d e mine de fond, espacées chacune de 50 mètres environ et pouvant contenir 2500 kilos d’explosifs divers.- Nous travaillons par équipe de 6 heures avec 18 heures de repos et alternons pour que chaque équipe soit de nuit ou de jour à son tour.
20 février
Nous faisons sauter la charge (en tout 12500kgs). Elle ne donne qu’un résultat partiel, l’officier commandant le travail (un lieutenant d’artillerie, ingénieur dans le civil) ayant fait remonter les chambres de mine un peu trop haut et celles se trouvant dans le sable par suite de ce cas. Malgré cela le lieutenant et plusieurs sous officiers, caporaux et soldats furent récompensés de ce fait (avancement, croix et croix de guerre).
Du 21 février au 15 mars
Travaux de réfection et tranchées. Boyaux et barricades à la stéarinerie (fabrique de bougies) de Saint Laurent. Nous sommes en deuxième ligne et travaillons de l’aube jusqu’à la nuit, quelquefois deux heures après la chute du jour. Tous les 3 ou 4 jours, nous prenons 24 heures de garde aux poste d’écoute de première ligne.(galerie de mine et maison minée). Il fait froid, la pluie tombe souvent et le brouillard ne sont pas rares.- Le secteur est assez calme, quoique la fusillade et canonnade n’arrêtent guère mais c’est surtout sur notre gauche que les combats sont acharnés, au nord d’Arras à Neuville Saint Vaast, Souchey, le labyrinthe etc. Nous logeons depuis quelques temps à l’ancien séminaire (rue Baudiment, non loin de la porte du même nom) car la citadelle étant bombardée continuellement est inhabitable. La compagnie 10/4 loge également avec nous.-
Du 16 au 31 mars
Nous travaillons à organiser le secteur de deuxième ligne à Saint Nicolas-Saint Laurent. Nous creusons de grands abris – cavernes pouvant contenir plusieurs compagnies de troupes de renfort. Plusieurs abris de mitrailleurs sont également faits ou refaits. Nous avons avec nous des fantassins, choisis parmi les ouvriers de leur compagnie et qui après avoir fait un stage d’un mois à l’arrière sous les directions d’instructeurs du génie, sont versés à cette arme et dénommés pionniers.- Ils sont une cinquantaine de chaque régiment de notre division, sous le commandement d’un officier et de plusieurs sous officiers et caporaux. Ce qui fait que notre compagnie est alors à l’effectif de 480 à 500 hommes.
Du 1er avril au 8 mai.
Pendant toute cette période du commencement d’avril au 8 mai, travaux ininterrompus de mines à Saint Laurent, Blangy. Nous avons un nouvel adjudant qui nous fait travailler ferme. Les galeries de mine sont assez spacieuses, mais le travail est très dur ; nous faisons 8 heures sur 24, soit de jour ou de nuit et il faut 1m50 d’avancement par équipe de huit heures, ce qui fait 4m50 par jour. De plus, comme nous logeons au séminaire qui est presque en dehors de la ville, il nous faut traverser celle-ci d’un bout à l’autre pour nous rendre à notre travail. Comme Arras est bombardée à toute heure, il arrive très souvent que nous l’échappons belle en allant au travail.
Du 9 au 11 mai
Pendant ces trois jours notre artillerie fait rage sur les tranchées ennemies, ça sent l’attaque, aussi sommes nous équipés, prêts à partir, pendant ce temps là. C’est un roulement de tonnerre indescriptible, on ne voit que par la fumée et le feu. Nous sommes comme des hommes saouls. Les tranchées ennemies n’existent plus paraît-il.
12 mai
L’attaque a eu lieu.- J’en suis encore sorti indemne, mais malheureusement beaucoup de copains ne peuvent en dire autant. Et de plus, il n’y a qu’une légère avance, un peu au nord de la ville. L’attaque marchait bien, nous étions en 2 et 3ème ligne ennemies sans trop de pertes, mais pas de renfort !- C’est inconcevable comme tout cela est mal mené. Aussi n’en sommes nous pas quittés moins de plusieurs milliers de tués ou blessés et ce quand il fallut retourner sur nos positions faute de munitions et de renfort.-
Du 13 au 21 mai
Pendant la période du 13 au 22, nous sommes employés à refaire le pont de Saint Nicolas sur la Searpe, rivière de peu de largeur. Nous faisons un pont de pilots capable de supporter beaucoup de charge. D’autres sections travaillent toujours aux mines de Blangy.
Du 22 au 23 mai
Nous partons d’Arras pour Anzin Saint Aubin, village se trouvant à 4 ou 5 kilomètres au nord, nous allons remplacer le 17ème corps dans son secteur et lui vient à Arras prendre notre place.
Du 24 mai au 1er juin
Dans ce secteur, nous reprenons nos travaux de mine ou plutôt nous poursuivons celui que nos prédécesseurs ont commencé. Ces travaux sont interrompus presque journellement par nos attaques très fréquentes dans le rayon de Le Labyrinthe Ecurie, Rochincourt, auxquelles nous prenons part à chaque fois. Du fait de ces attaques, le secteur est devenu un véritable enfer, les hommes tombent sans cesse et le tas va tellement grossissant que nous marchons que sur la bouillie humaine. C’est affreux !-
2 juin
Mort de Thuet de Poitiers, blessé dans les reins d’un éclat d’obus.
Du 3 au 4 juin
Dans cette nuit du 3 au 4 juin, nous sommes partis toute ma section participer à une nouvelle attaque, sous le commandement de notre sous lieutenant Ullmam, jeune officier de 20 à 22 ans. A trois heures du matin nous commençons l’attaque. Nous montons (la section de génie) les premiers sur la tranchée, notre lieutenant avec son intrépidité juvénile ne pensant qu’à aller de l’avant bravant la mort et les ordres de ses supérieurs, au bout d’un quart d’heure, l’attaque était terminée, échouée piteusement comme les précédentes , ce secteur d’Ecurie étant presque imprenable, l’ennemi l’ayant fortifié considérablement. Après l’appel des hommes fait aussitôt après l’attaque, nous constatons qu’un bon tiers de notre section est hors de combat (tant en tués que blessés)C’est dans cette attaque du 3 au 4, que je fus enterré par l’éboulement d’une tranchée provoqué par un éclatement d’obus- avec 4 fantassins. Lorsque je revins avec ma section le soir du 4, je ne pouvais pas me traîner, le côté droit ayant souffert du fait de l’éboulement. Je m’en sentis pendant une huitaine.
Du 4 juin au 11 juillet
Dans la période du 4 juin au 12 juillet continuation des mines et réfections de tranchées dans les mêmes secteurs cités plus haut. Le travail est très pénible, d’autant plus que, outre le danger, nous avons 6 kilomètres à faire par les boyaux et autant pour retourner.- De plus, comme nous logeons dans les maisons d’Anzin-Saint Aubin, l’ennemi nous ayant aperçu nous beaucoup de troupe. Trois obus tombent sur la maison où nous sommes et l’incendient.- Nous étions occupés à déguster une boîte de homard qu’un camarade avait reçue. Nous fûmes roulés à terre dans un nuage de poussière et de fumée.- Nous nous relevâmes tous sans une égratignure. Seul le homard avait souffert.
12 et 13 juillet
Nous partons de nouveau à 8 heures du soir pour le labyrinthe participer encore une fois à une attaque. J’ai avec moi le camarade Ronce, sous officier à ma section, avec lequel je suis très familier (nous sommes ensemble depuis le début de la guerre et aurait fait nos 2 ans ensemble également)… Après avoir parcouru plus de 10 kilomètres dans des boyaux pleins de boue, nous arrivons aux premières lignes, ravagées par le feu incessant de l’ennemi et là nous attendons. Nous sommes sous les ordres du sous lieutenant.L’attaque doit avoir lieu à 11 heures. A l’heure indiquée, après de signaux préparatifs nous nous préparons à monter à l’assaut. Mais comme si l’ennemi n’avait attendu que notre signal pour nous attaquer, nous les voyons sortir et escalader un à un la barricade, à 20 mètres d’où je me trouve, pendant que d’autres rampent sur la plaine en face de nous.- Aussitôt, changement de commandement : pendant que nous faisons faire à la moitié de nos hommes des feux de salve en face de nus, l’autre moitié s’emploie à passer des pétards et grenades aux défenseurs de la barricade qui ont fort à faire. Pendant une heure c’est un feu d’enfer de part et d’autre. L’artillerie prévenue aussitôt par signaux - fusées rouges et par téléphone, fait rage et nous sentons les obus passer sur nos têtes et tomber sur les tranchées ennemies comme la grêle. Bref, quoique notre attaque soit ratée, celle de l’ennemi l’est idem. L’appel fait, nous n’avons aucun blessé dans notre section. Par contre les fantassins de la barricade ont un peu souffert : une quinzaine de blessés, tous par les pétards ennemis - ces blessés ont été ramenés à l’ambulance par un aumônier qui a le grade de capitaine et la médaille militaire ; il les a pris un à un sur son dos et ce pendant tout le temps que dura l’attaque.- Les cadavres ennemis sont très nombreux devant nous et surtout à la barricade. Enfin après une attente de quelques heures nous rentrons au petit jour.
Du 14 au 23 juillet
Du 14 au 23, nous faisons un réseau de fil de fer entre la 2ème et 3ème ligne, à partir du labyrinthe jusqu’en face Curie (route de Lille comme point terminus.- Nous travaillons que la nuit et ce n’est point ce qui nous empêche d’être bombardé dur.- De plus c’est très difficile sur cette plaine jonchée de débris de toutes sortes, voire même de cadavres, de poser nos fils barbelés. Enfin nous terminons tout de même et nous partons, joyeux et contents pour le repos. Nous l’avons bien gagné, depuis près d’un an !Nous arrivons par camion automobile, à la ferme de sotteville, à quelques kilomètres d’Amiens. Nous sommes bien dans cette ferme, repos complet, mais défense de sortir se promener dans les environs. Nous rongeons notre frein et nous délassons des fatigues de cette longue campagne. Les permissions de 7 jours sont commencées. Plusieurs sont déjà partis. Nous partons à 7h du soir pour embarquer à la gare de Longueau. Après 14 kilomètres faits sous une chaleur excessive, nous arrivons enfin à cette gare et embarquons.
1er août
Nous arrivons à Revigny (Meuse) à 14 heures après avoir passé à Estrée St Denis, Cormois-Villers, Pantin, Noisy-le-Sec. Meaux, la ferté sous Jouarre, château Thierry, Dormans, Epernay, Châlons sur Marne, Vitry le François, Blesmes, Plussignemon et Pargny sur Saulse. Nous débarquons à Revigny et après une attente d’une heure, nous nous dirigeons sur Vroil (Marne) où nous arrivons à 18 heures et couchons.
Du 2 au 9 août
Nous voila de nouveau au repos complet et cette fois, nous sommes cantonnés dans un village et nous avons le droit de sortir. Nous allons à la pêche, à la chasse, (et il y a beaucoup de lapins dans le pays, nous les prenons à la main).Nous allons aussi souvent nous baigner, le temps étant très beau. Les permissions continuent à marcher mais ce n’est pas encore mon tour paraît-il.
10 août
Boum !- Départ pour le front. De nouveau un camion automobile et juste au moment que je n’étais plus qu’à une semaine de ma permission. Je ne suis pas veinard, voila tout ! Nous partons à 8 heures du matin et nous sommes débarqués à environ 10 kilomètres des lignes, dont on entend le bruit sinistre du canon, à 21 heures. Nous partons ensuite à pied sur une route défoncée par les obus. Il fait noir comme dans un four et c’est à peine si on peut avancer, le sac sur le dos, en trébuchant à chaque pas. Après une marche de plus de deux heures, voila qu’il recommence à tomber de l’eau. De plus, nous ne voyons plus aucun officier ou sous off pour nous indiquer où aller. La pluie redoublant, je rentre sous bois avec mon escouade au complet, grâce à ma petite lampe électrique qui les a fait se rallier à moi tout le long de la route. Nous montons nos tentes à la hâte et nous couchons sans même penser à manger.
11 août
Le lendemain nous nous réveillons et après avoir rapidement bouclé nos sacs, nous repartons à la recherche de notre compagnie que nous retrouvons à 500 mètres de là, campée également dans les bois. Le soir à 19 heures, nous partons au travail à 7 kilomètres de là, mais arrivés aux troisièmes lignes, notre lieutenant nous fait rebrousser chemin, l’ennemi attaquant et notre présence n’étant pas utile pendant cette attaque, vu que nos régiments d’infanterie étaient déjà arrivés là et se trouvaient à point pour renforcer les coloniaux qui étaient en première ligne. Nous retournons donc au cantonnement, ou plutôt sous nos tentes en plein bois- encore 14 kilomètres dans les jambes et toujours sous une pluie battante !-
Du 12 au 15 août
Nous restons ainsi jusqu’au 15 dans ces bois du haut bâti, faisant tous les jours nos 14 kilomètres aller et retour pour aller au travail, et il pleut toujours !- L’eau finit par traverser notre tente et nous gelons de froid dans ces bois, quelle misère !
16 août
Enfin !- La compagnie de génie que nous remplaçons est partie et nous pouvons aller dans ses cantonnements à flanc de coteau à 800 mètres des lignes. Nous prenons donc possession, mais quels cantonnements ! De simples huttes en branches, recouvertes de toiles goudronnées ou de tôles crevées par endroits par les shrapnells et où ils tombent de l’eau comme presque dehors. Enfin !
Du 17 août au 7 septembre
Nous y voilà, dans ces bois de la Gruerie en pleine Argonne !- Notre cantonnement se trouve juste à mi-chemin entre les villages de Vienne le château et la Haragée, détruits complètement par les obus ennemis et toujours bombardés sans relâche. Nous travaillons 12 heures sur 36, mais quel travail !- Nos galeries de mine font 0m70 au carré, lorsque l’on est au fond, impossible de se retourner pour marcher la tête en avant, on est obligé d’en sortir à reculons et comme la galerie a ordinairement une pente de 0m25 par mètre au minimum, la sortie s’effectue très péniblement. Les secteurs sont numérotés tous les 1km500 à 2 kms environ par lettres alphabétiques. Nous travaillons dans les secteurs Z.A.B.C.- ce qui nous donne un parcours de 6 ou 7 kms en première ligne. Le secteur n’est guère bon, l’ennemi cherchant toujours à attaquer sur ce point, de façon à encercler le plus possible la ville de Verdun, qui est distante de nous d’environ 2 ou 3 kms. Mais ces attaques menées par le Kromprintz sont infructueuses.
8 septembre
Celle du 8 également, quoique habilement préparée, échoua presque totalement. Il était 8 heures du matin et nous arrivions du travail, où nous avions passé toute la nuit. Nous étions occupés à boire du « jus » lorsque tout à coup, un bombardement imprévu nous fit lever la tête. Nous fîmes alors un va et vient ensuite au bas de nos cabanes.- Puis tout à coup, le vent qui venait du côté de l’ennemi, nous apporta ce que les bandits se servent pour leurs attaques : le gaz asphyxiant ; oh, alors, le jus fut bientôt bu !- Nous prîmes à la hâte nos lunettes et masque, mais ce genre de masque n’étant pas encore perfectionné, nous prîmes jusqu’à 11 heures quelques chose pour notre rhume !- Les yeux pleuraient et les vomissements nous prirent et durèrent plusieurs jours. Pendant ce temps la mitraille faisait rage. L’ennemi avait avancé jusqu’à nos troisièmes lignes (un peu à droite du ravin de la hougette) mais de rapide et vigoureuses contre attaques l’avait fait réintégrer les tranchées de départ, sauf sur une trentaine de mètres, dont il resta en fin de journée maître de notre première ligne. Les pertes furent énormes de part et d’autre.
Du 9 au 20 septembre
Pendant toute cette période, nous travaillons toujours aux galeries de mines. L’ennemi travaille ferme également, nous l’entendons distinctement par endroits. Plusieurs fois même, il nous fait des « camouflets » petites charges variant entre 50 kilos et 100 kilos d’explosifs. Nous n’avons aucun mort ou blessé, heureusement, dans ces camouflets, mais plusieurs camarades sont tués ou blessés en allant au travail.- Car le chemin que l’on prend pour y aller est très dangereux, repéré par l’ennemi et arrosé de « marmites » et de bombes qui sèment la mort à chaque pas.
Du 21 au 27 septembre
Sur ces entrefaites, je tombe malade. C’est mon embarras gastrique de l’hiver dernier qui me torture de plus belle. Le Major me met exempt de service, mais la maladie va en s’aggravant car on gèle dans les cabanes la nuit et de plus je ne puis être soigné comme dans un établissement sanitaire.
Du 28 septembre au 1er octobre
Pas un jour ne passe sans que plusieurs copains de la compagnie ne soient évacués sur les hôpitaux. Plusieurs partent avec plus de 40 de fièvre. Moi je suis toujours exempt de service. Je n’ai pas de fièvre.
Du 2 au 11 octobre
Toujours la même situation. Sur notre gauche en champagne, à quelques 15 kilomètres de nous une attaque formidable de notre part est commencée. Nous voyons, des hauteurs où nous sommes, l’ouragan de feu et de fer qui tombe là bas.- Quoique malade et exempt de tout service je me prépare à tout évènement, boucle mon sac, roule mes couvertures etc. Pendant 8 jours nous sommes sur le qui-vive. Nous n’attaquons pas, n‘ayant pour mission que de maintenir l’ennemi dans notre secteur.
Le 12 octobre
Ayant eu la fièvre toute la nuit, je le dis au Major à la visite du matin, qui après avoir contrôlé avec le thermo, m’évacue sur l’intérieur. Je pars en auto à 18 heures ; nous arrivons à l’ambulance des bois du haut bâti quelques minutes après. Là nous descendons et nous prenons une tasse de thé chaud, pendant que le caporal infirmier fait nos fiches.- Après une attente d’une heure, nous remontons en auto et filons sur Sainte Menchault où nous arrivons à 21 heures.- Nous passons alors la visite d’un Major. Dans une ambulance établie auprès de la gare.- Puis on nous fait coucher dans des baraquements en planches dans un lit sans drap.
13 octobre
Nous sommes réveillés à 7 heures du matin après avoir bu une tasse de café, nous sommes conduits à la gare, où nous embarquons dans un wagon sanitaire. Nous partons à 8 heures et arrivons à 19 heures à Bar le Duc, où nous couchons, toujours dans des baraquements établis dans la gare même. Nous avons un lit avec des draps, cette fois.
14 octobre
Réveillés à 5 heures du matin. Embarquons de nouveau dans un wagon ordinaire et repartons. Arrivons à 15 heures à Chaumont, où l’on nous met à l’hôpital G salle 4.
Du 15 au 26 octobre
Je garde le lit du 15 au 26 avec près de 40° de fièvre. Nous sommes très bien soignés dans cet hôpital. Le Major de notre division, originaire de Tours, est bon garçon, même blagueur et très « calé » sur la médecine, paraît-il. Nous avons pour les soins et pansements une gentille infirmière Melle Sburlato. Bref, avec d’aussi bons soins et une chambre toujours chauffée, je sens la fièvre diminuer peu à peu, puis disparaître complètement.
27 octobre
A partir de ce moment, le major me met au petit régime, c'est-à-dire un peu de purée sans pain.
Du 28 au 29 octobre
Puis 2 jours au petit régime avec pain et un quart de vin. Entre temps nous avons du quinquina, vins fortifiants, etc.-
Du 30 octobre au 1er novembre
Puis 2 jours au grand régime.- Purée, un peu de viande, pain, vin etc.…
2 novembre
Enfin le 2, nous trouvant assez forts, nous sommes, plusieurs camarades et moi, désignés pour partir dans un hôpital du midi.- Le matin on nous donne nos effets, (ceux qui ont été passés à l’étuve pendant notre séjour à l’hôpital à 90 degrés) puis nous partons pour la gare en autos à 18 heures A 19 heures le train part. Nous arrivons à Châtillon sur Seine à 21 heures et descendons du train. Nous sommes conduits dans un local où des matelas jetés à terre nous permettront de nous reposer un peu, jusqu’à 2 heures du matin, heure à laquelle le train sanitaire venant de la direction de Bar le Duc doit arriver.
3 novembre
Nous sommes réveillés à 1 heure ½ et peu après arrive le train sanitaire, déjà moitié occupé par des malades et des blessés. Nous embarquons à notre tour, puis le train repart. Nous passons successivement à Dijon (5h1/2), Châlon sur Saône (7h10), Mâcon (10h), Lyon. Aux deux premières stations nous sommes très gâtés par les gentilles infirmières. De ces gares, qui nous distribuent chaque fois : cigarettes, chocolat, café, etc.… A Lyon, où nous arrivons à midi, nous avons repas complet, sans sortir de notre compartiment. Les infirmiers et infirmières circulent dans le couloir les mains chargées de plateaux. Nous avons soupe, purée, saucisses, charcuterie, fromage, biscuits, vin, cigarettes. Bref, le voyage devient agréable, le premier depuis 15 mois.Nous repartons à 13 heures, toujours en direction inconnue ; Nous passons à sainte Colombe les Vienne (charmant pays), à Tournon à 16 heures, à Le Teil ‘Ardèche) à 19 heures et arrivons à Pont d’Avignon (petite station du département du Vaucluse), vers 22 heures. Je ne dors pas et peux apercevoir la ville d’Avignon, où j’ai passé un mois en 1911, comme je faisais mon congé.- Et nous filons…Passons à Nîmes à 23h30.
4 novembre
Au petit jour, nous sommes en plein midi maintenant avec des vignes, des vignes toujours, de chaque côté. De la voie ferrée on ne voit que cela.-Pendant que nous dormions, nous sommes passés par Montpellier 2h. 3h1/2 nous avons longé la mer jusqu’à Agde et ensuite nous sommes remontés vers Béziers, Narbonne où nous arrivons à 5h1/2 du matin.- Nous commençons a être fatigués d’un si long voyage. Deux nuits presque sans dormir, c’est beaucoup pour des convalescents de typhoïde !- Nous poursuivons pourtant toujours et le pire c’est que pas un de nous ne sait où nous allons. Arrivons à Carcassonne à 8 heures matin, on nous sert à déjeuner, puis le train se remet en marche…Nous commençons à bailler !!!Enfin, à midi, nous arrivons à Castres (Tarn) et l’ordre nous est donné de descendre. Ce n’est vraiment pas trop tôt ! Nous sommes fourbus.-Nous sommes conduits ensuite en autos à l’hôpital 17. Couvent bleu, ancien couvent transformé en hôpital depuis la guerre et situé presque aux faubourgs de la ville.- Après avoir vérifié nos fiches, nous sommes conduits dans la salle qui nous est désignée. Moi, je suis à la salle Saint Joseph. Désignée ainsi parce que la sœur qui s’occupe de nous se nomme ainsi. Il y 28 lits dans la salle, nous sommes que des convalescents de typhoïde à les occuper. Deux infirmiers sont adjoints à la sœur, spécialement pour les gros travaux de la salle : Balayage, chauffage, etc.. La sœur nous sert à table à tous les repas. –
Du 5 au 30 novembre
Du 5 au 30, nous restons dans cet hôpital. La vie nous est douce et nous reprenons peu à peu des forces._ Le Major, bon type, passe le matin nous demander si nous avons besoin de quelque chose. Le déjeuner du matin consiste en un grand bol de lait mélangé avec du café dans lequel nous trempons un morceau de pain. A tous les repas pain à discrétion à 10h1/2, à table de nouveau, deux plats de viande, un de légumes et assez souvent dessert offert par des Dames charitables ou par le médecin lui-même, ainsi que du café ; principalement le dimanche. Nous avons ¼ de vin par repas ; le soir soupe à 5 heures.- Bref, c’est la vie rêvée !- Nous nous promenons soit dans le parc qui est beau, ou en ville, car le Major signe des permissions pour sortir de 12h à 17 heures.- La température est assez douce, un peu froide dans les derniers temps. Le pays est montagneux et très pittoresque. Nous payons le vin 50 et 60c le litre.
30 novembre
Le 30, nous sommes sortants et passons devant la commission, présidée par un général.- Nous sommes tous proposés pour 45 jours de convalescence au couvent bleu. Enfin nous passons la visite et j’attrape un mois.- Nous partons le soir même. Entre temps j’ai télégraphié à Hélène pour m’attendre à Paris, car je passe par Paris.- Nous prenons le train à 18 heures.
1er décembre
Arrivée à Paris à 8h matin. Trouvé Hélène et Noémie à la gare d’Austerlitz.- Prenons le métro et filons chez Noémie._ Je passe la journée avec eux.- Il pleut.-Le soir Hélène et Gaby viennent me conduire à Orsay.-
2 décembre
Je pars à 20 heures. J’arrive à Poitiers à 2h1/2 du matin et à Sigon à 3h1/2.- Joie dans toute la famille.
Du 3 au 30 décembre
Je passe tout ce temps parmi la famille et ne fais rien, mais les forces ne reviennent pas vite.Le 30 j’obtiens une prolongation d’un mois.
Du 1er au 27 janvier 1916
Toujours au pays.- Je travaille un peu, mais ça ne va pas.-
Ce cahier s’est arrêté à ma première convalescence. Je le reprends aujourd’hui 29 octobre 1956 pour ajouter que je suis reparti aux armées, après un séjour à chaque fois au dépôt à Angers, 2 fois, la 1ère fois. Je reparti en février 1916 et fus évacué sur Brest pour congestion pulmonaire. Un mois à Brest, 2 mois à un hôpital de la Vendée à St Laurent sur Sèvres. Puis, retour au dépôt en septembre 1917.Parti le 31 novembre 1917 au front, évacué en janvier 1918, épuisé et cardiopathie, sur Bolbec (seine inférieure) et Brest. Un mois de convalescence et retour au dépôt, où je fus démobilisé définitivement le 12 février 1919.Entré à la compagnie de chemin de fer PO le 1er juin 1920, à Paris, retour à Poitiers 4 mois après. Nommé, après concours, facteur mixte à Thint-Oradour le 1er juin 1923, puis à Charroux 4 mois après. Retourné en qualité de facteur-écritures à Poitiers en décembre 1924. Passé commis de 2ème classe G.V à Poitiers, le 1er juin 1930. Enfin retraité avec 32 années1/2 de service le 1er juin 1946.A l’heure actuelle, après 10 ans de retraite, nous avons, mon épouse et moi, 22 petits enfants des 6 enfants que nous avons élevés. Nous n’avons d’eux tous, enfants, brus, gendres, petits enfants que des joies, malgré certaines misères.Poitiers le 29 – 10 – 1956R SAVIN
Sources
- Personne: AD de la Vienne et Familiales
- Famille: Familiales
Photos & documents
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